Elle regardait droit devant elle, immobile au milieu de la pièce. Depuis son réveil quelques heures auparavant, c'était la première fois qu'elle s'arrêtait de marcher, de chercher une sortie. Verity n'avait pas perdu l'espoir de sortir d'ici, au contraire ; cela pourrait prendre des jours, des mois peut-être, mais elle sortirait d'ici. Car quelque chose, quelqu'un peut-être l'attendait au dehors. Qui ? Elle savait pas. Elle ne savait plus. Mais cette personne en valait la peine, c'était la seule chose qu'elle savait. Prise d'une soudaine vague d'angoisse, la jeune femme cacha son visage dans ses mains. Elle ne se rappelait d'absolument rien, et c'était désarmant. Une lettre l'attendait à son réveil, une lettre lui disant de ne pas l'oublier. Mais oublier qui ? Ca la rendait folle, de ne pas pouvoir se souvenir.

Tout à coup, le bruit du plancher grinçant derrière elle la fit sursauter. Alerte, elle se retourna d'un coup, tout en cherchant des yeux quelque chose avec lequel elle pourrait se défendre. La seule chose qui lui tomba sous la main fut un balai tellement vieux qu'il menaçait de partir en miettes à chaque instant. Elle se rapprocha du mur, ne tenant pas à être en plein milieu de la pièce même si elle avait sûrement déjà été repérée. Verity avait peur, mais l'adrénaline prenait le dessus et elle était prête à se battre. Elle devint aussi silencieuse qu'une ombre, serrant le balai dans ses mains qui tremblaient légèrement.

Enfoiré…

Juliette était folle de rage, et les yeux toujours rouges d’avoir pleurer. Bon sang ce qu’elle en voulait à Jonathan...Elle ne voulait même pas y penser tellement ça lui faisait du mal. Elle lui avait fait confiance et voilà ce qu’elle recevait en retour. D’accord, elle n’avait peut etre pas été la meilleure femme qui soit mais ça...C’était bien pire selon elle.

Oh, elle n’avait pas pleuré devant lui, non, elle était partie, s’enveloppant dans toute la fiertée qu’elle avait et errait dans le manoir depuis. Elle ne voulait pas rester près de lui, à vrais dire, le plus loin serait le mieux. Elle avait bien pensée à se réfugier dans une des chambres, mais elle n’avait aucune idée desquelles étaient prises et lesquelles ne l’étaient pas…

Et faire irruption dans la chambre de quelqu’un ne lui disait absolument rien, pas ce soir. Surtout qu’elle était seule et sans défense, et vu la population de ce manoir...Ce n’était vraiment pas une bonne idée.

Elle finit par atterir dans le grenier, sans trop savoir où elle mettait les pieds, elle devait l’avouer. Elle s’arrêta net en voyant quelqu’un. De loin, elle était sûre que c’était une femme mais… Même comme ça elle ne voulait voir personne. Elle tenta de faire demi tour pour repartir lorsque le plancher grinça sous ses pieds, alertant la personne de sa présence ici.

Personne qui fit volte face, un balai en main, visiblement prête à se battre. Juliette marmonne un juron entre ses dents avant de soupirer. Elle ne pouvait pas juste simplement partir, non… Elle avait l’impression que le monde entier se liguait contre elle aujourd’hui.

« Pose ça, je vais pas te faire de mal… »

Elle en oubliait toute convenance. Elle avait juste envie de s’effondrer et de dormir, là, par terre. Elle s’approcha doucement de la jeune femme qui avait l’air aussi terrifiée qu’elle à son arrivée. Mais déterminée, contrairement à la rouquine...Tant mieux, elle s’en sortirait surement mieux qu’elle comme ça. Elle s’arrêta  bonne distance, se rapprochant juste assez pour que tout deux puissent distinguer le visage de l’autre.

Verity savait qu'elle n'étais pas seule, et même si à ce moment là elle aurait beaucoup aimé avoir de la compagnie ainsi que des réponses à ses questions, elle restait sur ses gardes. Après tout, c'est bien ce qui était écrit sur la lettre que la jeune femme avait trouvé à ses côtés à son réveil en ces lieux inconnus : "Ne fais confiance à personne". Le problème était que la blonde ne voyait pas comment se sortir de cette situation seule. Car elle était persuadée qu'elle n'était pas là par hasard et que trouver la sortie allait se révéler être une mission ardue. Tâchant de ne pas paniquer, Verity tenait si fort qu'elle avait peur de le briser, et se concentrait sur sa respiration afin de ne pas paniquer. S'était-elle déjà battue avant ce jour ? Elle n'en avait aucun souvenir. A vrai dire, elle ne se souvenait de rien. La seule chose que la jeune femme savait était qu'elle s'appelait Verity. C'était écrit au début de la lettre et ce prénom lui était familier, il devait donc être sien.

Tout à coup, elle put apercevoir la personne responsable des bruits qu'elle avait entendu. C'était une jeune femme, une rouquine, qui avait l'air triste et fatiguée. Tellement fatiguée... De suite, Verity baissa sa garde. Après tout, l'inconnue avait l'air aussi désemparée qu'elle et elle était le premier visage que Verity voyait depuis son réveil. Seule, elle ne s'en sortirait pas. La rouquine parla, lui proposant de lâcher son balai. Verity s'exécuta, décidant de faire confiance à son interlocutrice.

-Qui... Qui êtes-vous ? Et où suis-je ?

Une nouvelle, génial…

Juliette poussa un profond soupir. Elle ferma les yeux un moment, le temps de se masser les tempes avec insistance. Comme si elle avait besoin de ça, là tout de suite… Elle était épuisée, furieuse, et son corps était aussi douloureux que son esprit. Elle aurait eu tout les droits et toute l’envie du monde de juste partir et de laisser la blondinette là, à son sort. Elle finirait bien par comprendre toute seule ce qu’il en était, ou elle trouverait quelqu’un d’autre qui l’aiderait, elle s’en fichait.

Ce n’était pas son problème après tout, elle ne la connaissait même pas. Mais, en la regardant elle et son air paumé, Juliette eu pitié. Quand elle était arrivé, elle aussi était perdue. Elle ne se souvenait de rien, ne savait pas ou elle était, était terrorrisée. Et elle était tombée sur un connard de première qui l’avait manipulé. Et elle savait que ça pourrait être la même chose pour elle…

Juliette soupira, bon sang… Elle n’avait aucune envie de l’aider, pas maintenant, pas ce soir… Mais elle ne voulait pas non plus la laisser seule à ce soir, vu son attitude, elle ne ferait pas long feu sinon… Sans lui répondre tout de suite, elle alla s’asseoir sur un vieux sofa poussiéreux, à l’autre bout de la pièce…

On finissait par se faire à la poussière, elle était partout ici. C’était surement pour ça que Juliette passait autant dans les salles de bains, elle ne supportait pas de l’avoir sur elle… Mais pour ce soir elle s’en fichait. Elle se fichait de tout… Elle tappota la place libre à coté d’elle pour que la jeune femme vienne s’asseoir.

« On est ...Dans un manoir… C’est plutôt grand, sombre, poussièreux. Evite les égouts, les sous sols… Evite un peu tout et tout le monde en fait. Me demande pas pourquoi on est ici, j’en sais rien. Je m’appelle Juliette. Tu te souviens de ton nom ? Tu te souviens de quoi que ce soit en fait ? »

Juliette réalisa en parlant qu’elle ne faisait peut être pas l’accueuil le plus chaleureux qui soit à la jeune femme. Tant pis, cet endroit ne l’étais pas non plus.

Savoir qu'elle n'était pas totalement seule, qu'il y avait une présence non agressive en ce manoir rassurait beaucoup Verity. La rouquine qui lui faisait face n'avait en effet pas l'air de lui vouloir du mal et tant mieux car Verity ne savait pas se battre. Ne savait plus se battre en tout cas, peut-être savait-elle avant. De plus, elle ne connaissait absolument pas les lieux et n'aurait par conséquent pas su où fuir ou se cacher. Disons-le franchement, la jeune femme était totalement sans défense. Et elle détestait ça. Son interlocutrice n'avait pas l'air méchante, juste profondément tourmentée. Cela réconfortait Verity d'une certaine manière de savoir qu'elle n'était pas la seule personne enfermée ici. S'ils étaient plusieurs, ils avaient moins de chance de devenir fous et plus d'espoir de trouver la sortie de ce lieu inconnu... non ?

Son interlocutrice apporta des réponses à ses questions, ce qui décrispa un peu Verity. Elles étaient dans un manoir, qui ne semblait pas très accueillant au dire de la jeune femme, qui s'appelait Juliette. Il était rempli de dangers, mais ça Verity s'en était déjà aperçue toute seule. Inquiète, il lui sembla étouffer pendant un court instant mais très vite la jeune femme reprit contenance. Il ne fallait pas qu'elle panique. Elle allait s'en sortir. Et le fait de savoir que comme elle, Juliette avait perdu la mémoire, l'intriguait beaucoup. Que se passait-il ici ?

-Je sais que je m'appelle Verity, c'était écrit dans une lettre que j'ai trouvé à mon réveil ici. Je sais qu'il est capital que je sorte d'ici, que quelque chose m'attend dehors. Mais c'est tout. Depuis combien de temps es-tu ici ? Il y a d'autres amnésiques ?

Une foule de question la submergeait, elle voulait absolument tout savoir. Il y avait trop de questions qui restaient sans réponses, et ça la frustrait.